Le courlischrome…

… ou l’autochrome revisité

Cent ans après, refaire de la couleur avec un réseau additif

 

La technique du courlischrome reprend le principe de base des multiples procédés additifs du début du siècle dernier dont le plus répandu fut l’autochrome : un film noir et blanc panchromatique est exposé à travers une trame colorée puis développé comme une diapositive afin d’obtenir une vue en couleurs sur un support transparent. La trame de l’autochrome était faite de la juxtaposition de grains de fécules teintés, celle du courlischrome résulte d’une simple impression en jet d’encre.

 

Cent ans plus tard…Pourquoi se lancer dans une telle galère ?

 

Pour deux raisons, tout simplement:

 

D’une part, les films modernes diffèrent par leur rendu des couleurs, mais ont tous en commun une absence totale de texture due à la finesse extrême de leur grain.

Cet aspect lisse convient bien à certains sujets mais peut nuire à d’autres.

De ce fait, la transition vers les capteurs numériques a été en ce domaine rapide et sans état d’âme. Pourquoi donc se priver des avantages insignes de cette technique si au final les résultats sont les mêmes ?

Le grain, la texture, bref tout ce qui fait le charme de certains films noir et blanc traditionnels manquent ici cruellement…

 

D’autre part, la matrice de Bayer et ses primaires bleu/vert/rouge directement issues du triangle de Maxwell est aussi réductrice que celui-ci : toutes les nuances colorées n’y figurent pas et certaines sont écrasées.

On comprendra cela facilement ceci si l’on se réfère au « Tableau normalisé des couleurs » de CIE (commission internationale des éclairages !) de 1931. Les couleurs reproduites par un système additif à trois primaires sont celles qui sont comprises à l’intérieur d’un triangle dont les sommets correspondent aux trois primaires choisies ; les nuances qui figurent à l’extérieur de ce triangle disparaissent… Le schéma ci-dessous montre cela avec le gamut du film (triangle en pointillé) en comparaison au gamut de l'oeil (ensemble).

 

 

 

 

L’autochrome et sa trame rouge-orange/vert prairie/bleu violet était encore plus réducteur sur le plan chromatique, mais dans une gamme de tons qui nous séduit toujours.

 

La technique que je propose permet de jouer sur le nombre et la qualité des primaires retenues pour changer l’espace colorimétriques du film. Il est en effet possible de choisir plus de trois primaires et de les placer en fonction du résultat visé !

 Il ne s’agit donc pas de recréer l’autochrome – malgré toute la nostalgie qui l’accompagne – mais d’élargir la gamme des possibles offerte aux photographes et, en ce domaine, je n’ai testé qu’une infime partie des possibilités générées par ce nouveau support.
 

D'emblée j'ai cherché une alternative à la fécule de pomme de la terre pour la trame; j'ai exploré beaucoup de directions : microbilles de verre colorées, billes de latex etc... La technique la plus élégante - synthèse de particules avec un atomiseur et calibrage par séparateur cyclonique - me semblait vraiment hors de ma portée.

Je me suis donc rabattu sur l'idée d'une trame imprimée en jet d'encre et j'ai transformé une imprimante pour pouvoir imprimer sur du verre (l'imprimante avant/après).

Pour pouvoir imprimer sur du verre sans faire de pâtés, j'ai développé une sous-couche permettant un séchage de l'encre sur support non absorbant (sous-couche bien plus efficace d'ailleurs que les coûteux transparents du commerce!).

Les imprimantes imprimant en magenta, cyan et jaune je me suis intéressé aux colorants et j'en ai testé toute une série; en fait, il s'est avéré que le plus simple pour obtenir une trame rouge-vert-bleu est de jouer sur les recouvrements des taches magenta, jaune, cyan sans modifier les encres d'origine. En tâtonnant un peu, on peut avoir une trame sans trous - qui si elle n'est pas strictement trichrome - fonctionne néanmoins (la trame). Le trame obtenue est moins fine que celle de l'autochrome, mais son grain est magnifique! (ce que rend assez mal les deux vues présentées ici)

J'ai pour l'instant mis de côté l'impression sur verre - faute de pouvoir acheter une émulsion photographique panchromatique.

J'imprime désormais mes trames au verso d'un plan film débarrassé de sa couche anti-halo: il suffit de laver le verso, sans mouiller le côté émulsion car on altèrerait la sensibilité chromatique de l'émulsion... Le verso du film débarrassé de sa couche antihalo est ensuite recouvert d'une sous-couche le rendant imprimable, puis la trame est imprimée et recouverte d'un vernis afin que tout ne disparaisse pas lors du traitement...

L'émulsion est exposée à travers la trame et développée en inversible.

Cette solution n'est pas parfaite car la distance séparant la trame de l'émulsion (180 microns) est supérieure à la taille des tâches colorées (80 microns), ce qui entraîne un brouillage important; les couleurs n'apparaissent réellement qu'en lumière dirigée et rend nécessaire l'utilisation d'une visionneuse pour l'instant fors encombrante...

Néanmoins les progrès sont désormais rapides et les derniers résultats commencent à me plaire vraiment.

Je suis désormais à peu près sûr de l'intérêt esthétique de mon projet (rendu chromatique particulier, très beau grain de l'émulsion) et je souhaite améliorer les procédures pour que cela devienne tout à fait opérationnel. Il faut pour cela améliorer la procédure d'impression pour faire disparaître le "banding" bien disgracieux, puis repasser à l'impression sur verre... si je trouve une émulsion panchromatique!

la courlichromie en marche

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